Décès du preneur : à qui est attribué le bail rural ?
15/05/2025Le décès du preneur n’entraîne pas la résiliation automatique du bail. Ce principe, inscrit à l’article 1742 du Code civil, assure la continuité du contrat de louage, tant pour le bailleur que pour les ayants droit du preneur. En matière agricole, le Code rural et de la pêche maritime encadre cette transmission afin de garantir la poursuite de l’exploitation.
Le principe de la survie du bail rural au décès du preneur
Aux termes de l’article 1742 du Code civil, « le contrat de louage n’est point résolu par la mort du bailleur ni par celle du preneur ». En tant que contrat de louage de chose, le bail rural subsiste au-delà du décès du preneur, sauf disposition contraire.
Ce principe est confirmé par l’article L.411-34 du Code rural et de la pêche maritime, qui prévoit une transmission automatique du bail rural à l’entourage du défunt, sous conditions. Sont concernés :
- Le conjoint survivant ;
- Le partenaire lié par un pacte civil de solidarité (PACS) ;
- Les ascendants ;
- Les descendants.
Ainsi, ce mécanisme vise à favoriser la continuité de l’exploitation agricole au sein de la sphère familiale.
Les conditions relatives à la transmission du bail
Pour pouvoir prétendre à la dévolution du bail rural, les ayants droit doivent participer au moment du décès ou avoir participé effectivement à l’exploitation agricole au cours des cinq années précédant le décès.
Cette participation, qui ne doit pas être nécessairement continue, doit être réelle. La charge de la preuve repose alors sur l’héritier, qui doit justifier sa participation à l’exploitation par tous moyens : témoignages, attestations, documents comptables, etc.
À défaut, les héritiers peuvent renoncer à la poursuite du bail. Dans ce cas, ils doivent notifier leur volonté de résilier le contrat par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou par acte extrajudiciaire émanant d’un commissaire de justice, dans un délai de six mois à compter du décès du preneur. Passé ce délai, ils sont réputés avoir accepté la continuation du bail et deviennent redevables du paiement des loyers.
En cas de pluralité d’héritiers sollicitant la transmission du bail, une attribution préférentielle peut être prononcée par le juge. Le tribunal judiciaire statue alors en tenant compte de l’intérêt de l’exploitation, de l’aptitude des candidats, et de leur capacité à s’y maintenir.
Sur ce point, la Cour de cassation a récemment admis que cette attribution pouvait bénéficier à un héritier n’ayant pas participé à l’exploitation au cours des cinq dernières années. En effet, en l’absence d’ayant droit remplissant les conditions de l’article L.411-34 précité, le bail se transmet selon les règles de la dévolution successorale de droit commun (cass. civ 3ème du 9 janvier 2025, n°23-13.878).
La possible résiliation du bail par le bailleur
Lorsque le preneur décède en laissant des ayants droit qui ne remplissent pas l’une des deux conditions précitées, le bail peut être transmis à ses héritiers ou légataires universels, selon les règles de droit commun. Cependant, le bailleur dispose d’un droit d’opposition.
En effet, il peut solliciter la résiliation du bail rural dans un délai de six mois à compter du jour où le décès est porté à sa connaissance, conformément à l’article L.411-34, alinéa 3, du Code rural et de la pêche maritime. Il doit alors démontrer que les règles tenant à la transmission du bail ne sont pas réunies.
En revanche, les manquements ou les fautes éventuellement imputables au preneur, de son vivant, ne peuvent justifier une opposition à la dévolution du bail rural à ses ayants droit.
Ainsi, la transmission du bail rural s’effectue du plein droit au profit de l’ayant droit remplissant les conditions requises par la loi. Toutefois, la poursuite de l’exploitation ne le dispense pas du respect des règles relatives au contrôle des structures. Dans ce cas, il peut être amené à demander une autorisation d’exploiter le bien auprès de la Direction départementale des territoires et de la mer.